The Summer Girl (Avalon Bay, #3)(106)
Maman fait alors une autre chose totalement inhabituelle :
– Vous savez quoi ? Prenons de la bière ce soir.
Je n’en reviens pas.
– Vous allez boire de la bière ici ?
C’est l’un des meilleurs restaurants d’Avalon. Connaissant ma mère, en toute logique, elle ne devrait boire rien d’autre que le vin le plus cher de la cave.
Il y a quelque chose qui a changé chez elle. Même sa tenue dégage une impression différente. Elle porte une robe de marque chère sans manches, d’un bleu ciel qui s’harmonise avec ses cheveux roux qu’elle porte détachés ! Jamais je ne l’ai vue aussi cool. Elle m’a même complimentée sur ma robe quand Tate et moi l’avons retrouvée devant le restaurant.
Sans compter cet échange qui m’a laissée perplexe quand maman a salué Tate avec un sourire chaleureux en lui disant :
– Heureuse de te revoir, Tate.
Et qu’il lui a répondu :
– Heureux de vous revoir aussi, Tori.
Tori ???
Je n’en crois pas mes oreilles et je me tourne vers maman pour clarifier la situation. Jamais je n’ai entendu quelqu’un appeler ma mère Tori. Papa l’appelait parfois Vic, mais surtout Victoria. Même grand-mère utilise toujours son prénom en entier.
– Voyons, tous mes amis m’appellent comme ?a, m’a répondu maman en levant les yeux au ciel. Je ne vois pas pourquoi ?a t’étonne, Cass.
Pour être honnête, je garde toujours une certaine distance quand elle re?oit une amie au penthouse, je m’éclipse très vite. C’est bien plus facile que de se mettre à jouer le r?le mère/fille, celui pour lequel elle est si douée. Lorsqu’elle re?oit, elle prétend que nous sommes les meilleures amies du monde. Comme si nous étions Lorelai et Rory dans Gilmore Girls1, riant ensemble en pyjama et discutant avec désinvolture de nos coups de c?ur.
Ce qui n’est jamais arrivé et n’arrivera jamais.
Je suppose donc qu’on fait encore semblant ce soir. Moi et Tori, meilleures copines du monde. Heureusement, je sais que Tate n’est pas dupe.
Lorsque le serveur arrive, Tate commande une bière au nom bizarre en expliquant qu’elle est brassée localement. Maman dit au serveur d’en mettre deux, mais quand il se tourne vers moi, je refuse et commande un Coca light à la place. J’ai besoin de garder les idées claires… Je ne sais toujours pas pourquoi on est tous les trois assis à cette table et j’ai comme l’impression qu’elle nous tend un piège.
– C’est sympa, dit maman.
Une remarque qui ne fait qu’accentuer mes soup?ons. Qu’est-ce qu’elle prépare ?
– Alors Tate, Cassie m’a dit que tu étais marin ?
– Pas professionnellement, mais oui, j’adore naviguer. Je faisais pas mal de compétitions quand j’étais au lycée.
Tout en parlant, il joue avec le bord de sa serviette et j’observe la fa?on dont ses longs doigts bougent sur le tissu. Je me mets à avoir chaud en me souvenant de ces doigts caressant tout mon corps et de la sensation unique qu’ils me font. Je me souviens aussi de la fa?on dont ils attrapent mon cul et mes hanches quand je le chevauche.
Oh… non, ne rougis pas, je me dis.
Nos regards se croisent, il me sourit. Et voilà, je rougis.
– Je ne fais plus autant de compétitions que je le voudrais, poursuit Tate en me prenant la main.
Il croise nos doigts et j’essaie de ne pas sourire. Se tenir la main pendant le d?ner ? Devant maman ? Je remarque qu’elle approuve d’un regard que je ne lui connais pas.
– Je suis trop occupé par mon travail ces temps-ci, ajoute-t-il.
– Vous travaillez au Manoir ?
– ? temps partiel, surtout les week-ends. Le reste du temps, je suis dans l’entreprise familiale.
– Et qu’est-ce que c’est ?
– Bartlett Marine. Papa et moi la dirigeons ensemble. C’est une concession, mais nous nous occupons aussi de location de bateaux et des charters.
Je me contente d’écouter la conversation. Maman peut être tout à fait charmante quand elle le décide. Voire désarmante. Quand mes amis du lycée venaient me voir, ils ne comprenaient pas comment je pouvais insinuer que ma mère n’était qu’une salope narcissique enragée. Eux pensaient au contraire qu’elle était fabuleuse. Pour l’instant, je ne peux pas vraiment savoir ce que Tate pense d’elle. Il était plut?t réservé quand on s’est assis, mais maintenant, il semble s’intéresser à elle.
– Cassie m’a montré l’article sur ton père, dit maman en souriant. On dirait que tu viens d’une famille célèbre.
– N’allez surtout pas dire ?a à mon père, répond Tate en soupirant. Déjà qu’il se pavane au magasin en pensant qu’il est une star parce qu’ils ont publié cet article sur lui… C’est l’Avalon Bee, pas GQ, restons calmes.
Comme maman rit, je prends la défense du pauvre Gavin.
– Tu as déjà fait la une d’un journal, toi ? N’importe lequel, peu importe.