The Summer Girl (Avalon Bay, #3)(77)
– Je vois… tu as besoin de distraction.
Il ne croit pas si bien dire.
– Ouaip.
Malgré le plan que je viens d’organiser avec Nicole, j’ai toujours Cassie en tête lorsque je rentre chez les Jackson quelques heures plus tard. Je gare ma Jeep dans l’allée et, une fois dans la maison, j’effectue mon habituel contr?le de sécurité. Tout a l’air en ordre. Moi, en revanche, je suis toujours sur les nerfs. Après une douche rapide, je descends et attrape le paquet de cigarettes et le briquet que j’ai cachés dans la cuisine.
Je m’installe sur la terrasse arrière et sors une cigarette. Il est neuf heures et demie, et bien que le soleil se soit couché il y a peu de temps, la lune est déjà haute et brillante, projetant des tra?nées d’argent sur l’eau calme de la baie. Je jette un coup d’?il vers la maison de Cassie. La lumière du patio est allumée, mais je ne vois personne dehors. Je m’approche de la balustrade qui surplombe la jetée et j’allume ma cigarette. J’inspire profondément en laissant la nicotine bien pénétrer dans mes poumons jusqu’à avoir l’impression qu’ils vont exploser, et ce n’est qu’à ce moment-là que j’expire, en regardant l’épais nuage de fumée flotter et se dissiper peu à peu dans l’air.
J’aime cette ville, vraiment. Mais parfois, elle m’angoisse. Surtout quand je regarde la mer et cette bande de terre qui s’incurve au bord de la baie. Parce que je sais qu’au-delà, il y a l’océan, et que chaque cellule de mon corps réclame que j’aille vers lui. Je veux naviguer en m’aidant des étoiles. Je veux voir de nouveaux horizons, rencontrer de nouvelles personnes, vivre des choses que je ne vais jamais vivre à Avalon Bay. Les petites villes ont leur charme, elles sont comme une paire de bras réconfortants qui vous protègent, mais ces mêmes bras finissent par vous retenir. Ils vous empêchent de bouger.
Je suis enclin à l’introspection ce soir, ce n’est pas bon pour toi. J’aurais mieux fait de rester avec Evan, de lui proposer une autre tournée de bières et quelques parties de billard.
Je tire une nouvelle taffe. J’expire à nouveau en écoutant les bruits de la nuit. Le bourdonnement des insectes, le bruissement des arbres, une voiture qui passe sur la route, un éclat de rire qui monte d’une jetée quelques maisons plus loin, on dirait qu’ils organisent une petite fête.
Tout à coup, j’entends plus nettement une autre voiture, le bruit vient du c?té des Tanner. Une porte claque. Un éclair de mouvement traverse ma vision périphérique, et je réalise que le patio n’était pas vide. Il y a une femme qui boit un verre de vin. Ce n’est pas la grand-mère de Cassie. Lydia Tanner a les cheveux noirs, celle que je vois a les cheveux roux, mais plus foncés que ceux de Cassie. Je fronce les sourcils. Est-ce que c’est sa mère ? Pourtant, elle m’avait dit qu’elle n’arriverait pas avant la mi-ao?t. La porte arrière s’ouvre en grin?ant, une autre personne sort. Le feuillage la cache, mais je reconnais la voix de Cassie.
– Coucou, maman. Je reviens d’un d?ner avec Joy. Je voulais juste te dire bonne nuit.
OK, donc c’est bien sa mère. Je me demande quand elle est arrivée. J’ai été au yacht-club tout le week-end, alors je n’ai pas vraiment prêté attention aux allées et venues d’à c?té. ?a, plus le fait que j’ai tout fait pour éviter Cassie depuis les ébats de la fenêtre.
– C’est ?a, la tenue que tu portais pour le d?ner ? demande sa mère.
– Oui. Qu’est-ce qui ne va pas ? Nous sommes juste allées au Joe’s Beach Bar. Le code vestimentaire est décontracté, maman.
Le ton de sa voix n’est pas comme d’habitude. Je le trouve forcé, comme si elle essayait de rester calme sans y arriver.
– Je croyais qu’on avait parlé des crop tops, Cass.
J’écrase ma cigarette dans le cendrier de la balustrade. Je me sens mal d’écouter aux portes, je ne veux pas le faire, mais c’est difficile de m’en empêcher, surtout la nuit. Pas de bateaux sur l’eau, pas d’enfants qui crient, pas de mouettes qui gueulent ; il n’y a que le petit frémissement des moustiques, un cricket de temps en temps et les voix très claires de Cassie et de sa mère… qui n’en démord pas :
– Ce n’est vraiment pas très flatteur pour toi, ma chérie.
Tout de suite, ?a m’énerve. Mais on s’en fout ! Tout lui va, à Cassie.
Et si je me souviens bien, elle portait un haut court la première fois qu’on s’est embrassés. Je me souviens parfaitement de la fa?on dont il épousait ses seins. Maintenant que j’y pense, je me souviens aussi de ce qu’elle m’a dit à propos de sa mère. Très critique. Centrée sur elle-même. Aucune empathie. En l’entendant, j’ai l’impression qu’elle remplit toutes les cases.
– Je ne sais pas… moi, je les aime bien.
Je sens Cassie plus désinvolte, mais le simple fait qu’elle ait à défendre ses choix vestimentaires m’ennuie. Elle n’a pas à se justifier auprès de qui que ce soit.