The Summer Girl (Avalon Bay, #3)(142)



Je remarque que les yeux de maman se remplissent de larmes.

Je ne sais pas trop quoi en penser, mais pour moi, tricher est impardonnable.

Je ne sais pas comment elle a pu lui pardonner. Mais elle a d? le faire, car je n’ai senti ni amertume ni ranc?ur dans notre maison depuis ce temps-là. Pas de disputes à huis clos. Pas d’hostilité. Pour autant que je sache, ils se disent tout. Ils semblent aussi amoureux aujourd’hui qu’ils l’ont été depuis ma naissance.

– Je ne m’attends pas à ce que tu comprennes. (Papa hausse les épaules.) Et je ne te demande pas de me pardonner.

Je ris franchement.

– Merci beaucoup.

– La personne que j’ai blessée m’a déjà pardonné, dit-il simplement.

– Tu ne penses pas m’avoir fait du mal ?

– Ta vie a-t-elle changé au cours des dix dernières années ? Est-ce que nous t’avons moins aimé ? Est-ce que je t’ai moins bien traité ?

– Non, mais…

Je suis de nouveau en colère, parce que… oui, il a été un bon père ; non, cet écart de conduite ne m’avait pas affecté quand c’est arrivé. Mais, bon sang… c’est aujourd’hui qu’il me fait du mal. Un grognement s’échappe de ma gorge.

– … Tu as baisé la mère de ma copine.

Papa tressaille.

Maman p?lit.

– Alors, s’il te pla?t, ne reste pas là à faire comme si c’était cool. Je me fiche que maman n’ait pas voulu conna?tre le nom de ta ma?tresse à l’époque, mais tu aurais d? le dire dès que j’ai commencé à sortir avec Cassie…

– Je ne savais même pas qu’elle était la fille de Victoria. Je n’en avais aucune idée !

En y réfléchissant, je me rends compte qu’il dit peut-être la vérité. Je leur ai dit que Cassie était une voisine, mais je n’ai pas précisé de quelle maison il s’agissait. Je ne pense même pas avoir mentionné son nom de famille… Allez, n’y pense plus, tant pis, inutile de s’attarder sur ces petits détails.

– Depuis que je suis né, tu as passé ton temps à me vanter les valeurs de la famille, je murmure. Genre ? rien n’est plus important que la famille, Tate ?. La famille est une équipe, et c’est toi qui as failli faire exploser cette foutue famille. Victoria a raison de dire que tu essaies de te présenter comme un type bien. Un saint parfait et désintéressé. Mais tu n’as été qu’un sale égo?ste quand tu as triché, et tu restes égo?ste quand tu parles du magasin et de sa concession que tu as développée pour me la transmettre…

Il tente d’intervenir, l’air inquiet.

– Tate…

– Parce ce que ce n’est pas moi qui t’intéresse. Tu ne penses qu’à tes besoins d’égo?ste. Tu veux m’avoir au magasin pour être avec quelqu’un quand tu regardes des photos de bateaux. Tu veux une présence pour que tu puisses partir en vacances avec maman. Moi, tu t’en fous.

Je pose brutalement ma tasse. Le café déborde en éclaboussant l’?lot en cèdre. Maman se lève.

– Tate, dit-elle avec autorité. Je comprends, c’est un grand choc pour toi, mais nous restons tes parents. Tu ne peux pas parler à ton père comme ?a.

Je la regarde fixement. Puis je secoue la tête et je sors par la porte de derrière. Je ne sais pas où je vais. Je suis pieds nus, vêtu d’un pantalon de pyjama à carreaux et d’un vieux tee-shirt du club nautique. Je fais le tour de la maison et descends la rue. Cette rue où je vis depuis l’?ge de douze ans, dans cette ville dont je suis tombé amoureux dès notre arrivée. Le premier jour d’école, j’ai rencontré les jumeaux, Wyatt et Chase. J’ai rencontré Steph, Heidi et Genevieve, j’ai tout de suite eu ce grand groupe d’amis. Emporté dans cette nouvelle vie géniale, je ne prêtais pas attention à la vie de mes parents. J’ai vaguement été conscient de ? la période difficile ?, mais elle a passé et je ne me suis même pas arrêté pour réfléchir à ce qu’elle voulait dire.

Et maintenant, je marche dans la rue, pieds nus, en essayant de comprendre pourquoi je suis si en colère, et c’est là que, tout à coup, je comprends. Je suis en colère parce qu’il est tombé de son piédestal. Je n’ai jamais fait exprès de le placer si haut, mais j’ai toujours admiré mon père. Je n’ai jamais voulu le décevoir. C’était la personne la plus forte et la plus gentille que je connaissais. Pour moi, il ne pouvait rien faire de mal… Et voilà que je découvre qu’en fin de compte, il est parfaitement capable d’être un connard égo?ste. J’aurais d? être moins na?f, tout le monde en est capable. Mais je suppose qu’on ne s’attend jamais à ?a de la part de ses parents.

Je me retrouve dans le petit parc au bout de notre rue. Il n’est que sept heures, un samedi matin, et le parc est vide. J’aper?ois une mère avec une poussette à une centaine de mètres sur l’allée… et c’est à peu près tout. Je trouve un banc pour m’asseoir avant d’enfouir mon visage dans mes mains. Je regrette de m’être emporté contre ma mère ; contre mon père, pas tant que ?a. Ils ont réussi à s’en sortir. Je comprends. Mais eux ont eu onze ans pour le faire quand, moi, je n’ai eu que onze putains de minutes.

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