The Summer Girl (Avalon Bay, #3)(58)
– Oh, que dirais-tu de ?a ? suggère Joy en ramassant la feuille de papier cartonné ivoire qui se trouve devant elle : Six le?ons de golf, avec… roulement de tambour… Lorenzo !
Elle prend l’accent italien pour prononcer son nom.
Lorenzo, c’est le prof de golf du club depuis au moins une centaine d’années. Si on me disait que c’est un fant?me, coincé entre deux mondes et forcé d’errer dans Le Manoir pour l’éternité, je n’aurais aucun mal à le croire. J’ai quelque part des photos de ma mère me tenant dans ses bras au club quand j’étais bébé avec, tapi à l’arrière-plan, Lorenzo avec son éternelle longue queue-de-cheval et la même peau trop bronzée qu’il a toujours aujourd’hui. Cet homme ne vieillit pas. Il n’a aucun respect des autres et se penche toujours beaucoup trop près de vous pour vous parler. Adolescentes, Joy et moi avions l’habitude de nous cacher chaque fois qu’on l’apercevait de loin sur notre chemin.
Je blêmis en voyant la liste.
– Je préférerais bouffer mes propres cheveux. Sans rire.
Joy pousse un cri avant de se mettre une main sur la bouche pour étouffer sa voix. Trop tard, les membres plus ?gés du country club qui nous entourent nous regardent déjà d’un sale ?il. Merde… et nous ne sommes même pas ivres… Dieu merci ! Ces gens vont nous ha?r d’ici la fin de la soirée si on continue.
Je m’approche de la table voisine, où ma grand-mère, penchée sur une petite carte blanche, griffonne un montant avec son feutre noir. Elle est en train d’enchérir sur un panier cadeau géant offert par La Savonnerie, une des boutiques artisanales de la ville.
– Oh, mon Dieu… non ! Madame Tanner, s’exclame Joy en jetant un coup d’?il à l’offre de grand-mère. Vous venez d’offrir deux mille dollars pour un panier de savons.
Elle secoue la tête, incrédule.
– Ce sont d’excellents savons, dit grand-mère d’un ton un peu pincé avant de glisser la carte dans la bo?te en carton posée sur la table. As-tu trouvé un lot qui t’intéresse ? me demande-t-elle ensuite.
– Je n’ai pas encore vu passer le forfait spa, c’est la seule chose qui m’intéresse. Si quelqu’un ose surenchérir sur moi, je l’assassine. Je le jure, je fantasme tous les jours sur leur massage aux pierres chaudes.
– Ne dépense pas tout ton argent pour ?a, me rappelle Joy, les yeux noirs tout pétillants. Gardes-en assez pour faire une offre sur ton ami Tate lors de la Vente des célibataires.
Grand-mère a l’air amusée.
– Tu fais une offre sur Bartlett ?
– Peut-être… je dis à contrec?ur. Il m’a demandé de le sauver si les cougars font du zèle.
– J’aime bien ce gar?on.
Grand-mère rit doucement.
Moi aussi.
Ce qui devient un vrai problème. Surtout après ce qui s’est passé entre nous l’autre soir. Joy me soutient que ?a n’a aucune importance. Même Peyton a minimisé la chose quand je lui en ai parlé. Mais elles se trompent toutes les deux. Quand tu rentres à la maison après avoir vraiment embrassé un mec et que tu fais semblant d’en embrasser un autre, c’est un problème.
Et quand le type qu’on fait semblant d’embrasser est justement celui qu’on aimerait embrasser pour de vrai, mais qu’on ne peut pas parce que lui ne vous aime pas comme ?a, c’est aussi un problème.
Avant de pouvoir m’attarder sur cette épineuse situation, mon portable émet un bip avec un message de – ironiquement – celui qui est à fond sur moi.
Aaron : Comment ?a se passe, la soirée de charité ?
Moi : Ma grand-mère vient d’enchérir 2 000 $ sur des savons.
Aaron : Audacieux.
Moi : N’est-ce pas ?
Aaron : Toujours OK pour d?ner demain soir ?
Moi : Oui. J’ai h?te.
Je range le portable dans ma pochette argentée tout en essayant de me persuader que j’ai vraiment h?te de revoir Aaron. Après tout, peut-être que depuis la fête foraine, il a perfectionné ses talents d’embrasseur. En s’entra?nant sur un oreiller ou autre chose. On a le droit de rêver, non ? Parce que le souvenir de sa langue agitée plongeant à plusieurs reprises dans ma bouche, comme si elle cherchait un trésor dans mes amygdales, me donne envie de vomir. Dommage, parce que, à part ?a, c’est un mec super cool. Il m’envoie des textos tous les jours depuis qu’on s’est rencontrés. Des mèmes, des pensées inattendues. Il est hilarant.
Mais…
Je ne sais pas si Aaron est le bon.
Ne vous méprenez pas, je n’ai certainement pas gardé ma virginité pour le grand amour. Je ne reste pas à la maison à attendre que le prince charmant vienne m’enlever. Mais j’aimerais au moins être follement attirée par cet homme. J’aimerais perdre tous mes moyens en sa présence. Je veux le désirer si fort que je ne puisse résister à l’envie de lui arracher ses vêtements. Je veux ce niveau d’alchimie.