The Summer Girl (Avalon Bay, #3)(127)



Mon Dieu… Qu’est-ce qui se passe dans ma tête.

Rien de tout ?a n’arrivera. Jamais. Déjà parce que j’ai décidé de ne pas y aller. J’ai promis à papa que je n’irai pas.

– Tu vas parler à ton père de la dispute ? je lui demande, le regard perdu dans le ciel qui s’assombrit.

– Oh mon Dieu, non.

– Pourquoi ?

– Parce qu’il est clair que c’est un sujet délicat pour lui.

Je caresse doucement le bras de Cassie.

– Normal. Ta mère a fait une fausse couche ; ensuite, elle s’est battue pour avoir la garde exclusive au lieu d’accepter la garde partagée comme ton père le voulait. Tu ne veux pas en savoir plus ? Son point de vue sur cette fausse couche et sur tout ce qui s’est ensuivi ? (Je me surprends à froncer les sourcils.) Tu ne veux pas lui parler franchement ?

– Mais on le fait, proteste-t-elle. Parfois… de temps en temps… (Elle soupire.) Bon, OK… On ne va jamais au fond des choses. J’en garde beaucoup pour moi, mais…

Je ris doucement, je devine ce qu’elle va répondre :

– Mais il y a un c?té positif… Vas-y, je t’écoute.

– Il est présent dans ma vie, répond-elle simplement.

Je fronce les sourcils.

– Et tu penses qu’il te tournerait le dos si tu partageais tes sentiments ?

– C’est possible. Je… (Sa voix commence à trembler.) Je ne veux pas être une charge pour lui. Avec l’éducation des jumelles, il en a assez sur le dos. Il n’a pas besoin d’entendre les jérémiades d’une fille adulte qui veut savoir pourquoi il ne s’est jamais battu pour obtenir sa garde ni à quel point ?a lui a fait mal de voir dispara?tre la chambre de son enfance, à quel point c’est horrible de se sentir remplacée… à quel point je suis jalouse de sa nouvelle famille.

Je respire un grand coup et resserre mon bras autour d’elle.

– Je n’avais pas réalisé que tu en avais tant sur le c?ur.

Je sens sa main trembler contre mon ventre.

– Et pourtant… Juste après la naissance des jumelles, quand papa avait soudain encore moins de temps à me consacrer, j’avais l’habitude de tout le temps écouter une chanson. Elle s’appelait ? Jealous1 ?, et je m’allongeais dans ma chambre à Boston pour l’écouter en boucle parce qu’elle résumait parfaitement ce que je ressentais. J’étais jalouse que papa ait cette nouvelle vie dont je ne faisais plus partie.

Je me souviens très bien des paroles de cette chanson, elles sont déchirantes. Elles me brisent l’?me. L’idée que Cassie ait pu ressentir ?a me fend le c?ur.

– Ne te méprends pas, j’adore mes petites s?urs, je t’assure. Et j’aime bien Nia. Mais je ne peux pas te dire combien de fois je suis restée allongée à pleurer à cause de ?a. Parfois, je rêvais que papa arrivait à Boston pour venir me chercher… qu’il passait devant ma mère en lui annon?ant qu’il me ramenait à la maison parce qu’il était malheureux sans moi. (Comme dans la chanson. Cassie laisse échapper un soupir tremblant, un petit rire tout fragile, et ajoute :) C’est idiot, je sais. Mais j’avais quinze ans. ? Angoisse ? était mon deuxième prénom.

Je vois flou tout à coup, comme si l’humidité de l’air s’accrochait à mes cils. Je cligne rapidement des yeux, c’est une erreur. Une larme coule de mes yeux et tombe sur la joue de Cassie, toujours appuyée sur mon épaule.

– Oh mon Dieu, Tate… tu pleures ?

Que quelqu’un me tue, bordel ! Je déglutis avec difficulté. Ma gorge est si serrée qu’elle me fait mal.

– Tu pleures, dit-elle, tout étonnée, en se relevant sur le coude pour me regarder. Je suis désolée, je ne voulais pas te faire de la peine.

Je lève la main pour m’essuyer les yeux.

– Désolé, c’est juste tellement triste, Cassie.

Je la serre fort contre moi, elle est si douce et si agréable à tenir dans mes bras. Soudain, je m’imagine une Cassie de dix ans, obligée de quitter Avalon Bay et son père, emmenée presque de force chez sa mère de merde. Mes yeux recommencent à piquer. Décidément, j’ai du mal à ravaler cette boule qui m’obstrue la gorge.

– C’est tellement touchant, murmure-t-elle en enfouissant son visage dans mon cou. Personne n’a jamais pleuré pour moi.

Putain… je n’ai jamais pleuré pour personne jusqu’à maintenant. Mais c’est Cassie, l’?me la plus gentille que j’aie jamais rencontrée. La fille la plus dr?le, la plus sexy, la plus irrésistible que j’aie jamais fréquentée, et je me sens…

Et, tout à coup, tout devient clair dans ma tête. Je comprends.

Je sens.

L’insaisissable, je le ressens.

Ce qui fait que mes parents se regardent comme ils le font. Ce sentiment que j’attendais et que jamais je n’ai ressenti avec aucune des filles qui ont croisé ma route au fil des ans.

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